L’avenir du français sur Internet


Bien sûr, l’anglais a été et demeure encore la langue dominante sur Internet avec 565 millions d’usagers (mai 2011). Pourtant, malgré que le déploiement d’Internet se soit autrefois effectué fortement en provenance des États-Unis, les différentes langues parlées sur le globe tendent à reprendre leur place, proportionnelle au nombre de locuteurs réels. Ainsi, plusieurs autres langues montrent une forte croissance, notamment le chinois (510 millions d’utilisateurs), la langue arabe (65 millions) et le russe (60 millions).

La place du français sur Internet demeure petite comparativement à d’autres langues comme l’anglais, le chinois et l’espagnol. Néanmoins, les francophones arrivent en 8e position en nombre d’utilisateurs d’Internet avec 60 millions d’utilisateurs, soit 3% des usagers d’Internet. Le nombre d’utilisateurs francophones d’Internet montre aussi une bonne croissance de 398,2% de 2010 à 2011.

Quant aux services de réseautage social, la tendance est la même. En Chine, l’utilisation de services de réseautage social dépasse largement les réseaux connus en Occident par leur nombre d’utilisateurs : QZone (560 millions d’utilisateurs), Tencent Weibo (337 millions d’utilisateurs) et Sina Weibo (334 millions d’utilisateurs). Il y a aussi Badoo qui est très populaire en Amérique latine et en Europe (133 millions d'utilisateurs) et Orkut qui est très utilisé au Brésil et en Inde (100 millions d'utilisateurs). Parmi les utilisateurs de langue russe, Vkontakte compte plus de 111 millions d'utilisateurs.

Facebook demeure néanmoins le service de réseautage social le plus utilisé mondialement avec ses 908 millions d’utilisateurs. Il s’agit toutefois d’un environnement multilingue et les Américains ne sont plus les principaux utilisateurs de ce réseau : l’Europe compte désormais 232 millions de personnes inscrites alors que l’Amérique en compte 222 millions et l’Asie en compte 219 millions.

En 2010, le français était la langue de 23,5 millions d'utilisateurs de Facebook, soit 6% des utilisateurs de Facebook. Ceci positionnait le français comme 3e langue en importance, derrière l'anglais (213,2 millions pour 52% des utilisateurs) et l'espagnol (61,2 millions pour 14% des utilisateurs de Facebook). Des données plus récentes révéleront certainement une percée importante d'autres langues.

Sur Twitter, le français représente moins de 1% des messages échangés, mettant le français en 11e position. Quoique les Facebook, Twitter et LinkedIn s'étendent rapidement dans le monde, il faut rappeler qu'en France les principaux médias sociaux utilisés sont Badoo et Skyrock, derrière Facebook.

Le français a un bel avenir sur les médias sociaux compte tenu de plusieurs avantages. D’abord, il y a 220 millions de francophones sur la planète. Elle est la neuvième langue la plus parlée dans le monde et l’une des deux seules langues à être parlée sur tous les continents du monde (avec l’anglais). Elle est l’une des six langues officielles de l’ONU. Le français est une langue officielle dans trente-deux États et dans les soixante-quinze États qui font partie de l’Organisation internationale de la Francophonie. Sa présence sur Internet est exceptionnelle, car elle apparaît en troisième position en termes de nombre de pages diffusé sur Internet, après l’anglais et l’allemand.

Mais plus encore, le nombre de locuteurs francophone tend à s’accroître. D’après les projections réalisées par les démographes, on pourrait compter 715 millions de francophones en 2050, dont 85% seraient situés en Afrique. Ainsi, les francophones, qui représentaient 3% de la population mondiale en 2010, pourraient représenter environ 7% en 2050. Même que le français est la langue qui affiche la plus forte croissance après le chinois dans le monde. En contrepartie, la part de l’anglais tend à diminuer, la population de langue maternelle anglaise passant de 9% à 5% en 2050. Et pourquoi le français s’étend-il à ce point? Cette croissance provient essentiellement des pays africains qui, bénéficiant de systèmes d’éducation de plus en plus développés, forment un nombre croissant de jeunes à maîtriser la langue française.

Les analyses démographiques indiquent que le français sera en forte progression dans le monde. Si la tendance se répercute dans les médias sociaux, le monde francophone deviendra un des espaces qui auront la plus forte croissance au cours des prochaines décennies.

Références

http://vincos.it/2012/06/11/la-mappa-dei-social-network-nel-mondo-giugno-2012/
http://www.francophonie.org/-Reperes-.html
http://www.pnyx.com/fr_fr/sondage/630
http://en.wikipedia.org/wiki/List_of_social_networking_websites
http://fr.wikipedia.org/wiki/Distribution_des_francophones_dans_le_monde
http://fr.wikipedia.org/wiki/Anglais
http://www.internetworldstats.com/stats7.htm
http://www.insidefacebook.com/2010/05/24/facebooks-top-ten-languages-and-who-is-using-them/
http://semiocast.com/downloads/Semiocast_Half_of_messages_on_Twitter_are_not_in_English_20100224_fr.pdf

Mais qu’est-ce qu’une communauté?


À l’ère des médias sociaux, il y a un terme que l'on croise un peu partout, celui de «communauté»!

Après une décennie à parler de «communautés virtuelle» et de «communauté en ligne», la référence au médium réseautique a été retirée pour affirmer que ces communautés formées à travers des réseaux informatiques sont des communautés à part entière. Pourtant, l’interconnectivité entre les personnes grâce aux médias sociaux tend plutôt à raffermir le statut d’individu, atome social en interaction avec tous à la fois. Mais puisque le terme «communauté» est magnifiée dans le contexte des réseaux sociaux, il n’est pas superflu de se pencher sur sa signification.

Le concept de «communauté» est une notion centrale pour comprendre la formation des liens sociaux qui unissent les individus. Une communauté est un ensemble de personnes qui ont en commun des objectifs, des relations sociales, un sentiment d’appartenance au groupe et qui tend à s’organiser pour assurer son maintien dans le temps.

Pour sa part, Guy Rocher définit une communauté comme suit : «La communauté est formée de personnes qu'unissent des liens naturels ou spontanés, ainsi que des objectifs communs qui transcendent les intérêts particuliers de chaque individu. Un sentiment d'appartenance à la même collectivité domine la pensée et les actions des personnes, assurant la coopération de chaque membre et l'unité ou l'union du groupe.». (Rocher, 1968, p.174.)

On constate dans cette description cinq éléments essentiels à l’existence d’une communauté : des objectifs communs, un sentiment d'appartenance au groupe et des relations de coopération entre les membres. Et tous ces aspects concourent au maintien de l'unité du groupe dans le temps, car toute communauté vise une certaine subsistance, ne serait-ce que pour un temps prédéterminé.

Historiquement, la territorialité a exercé un rôle important dans la formation des communautés. On distingue généralement les communautés en trois types. D’abord, il y a la communauté de sang établie au sein du clan ou de la famille. Ensuite, il y a la communauté de lieu qui se forme dans un contexte de voisinage. Vient ensuite la communauté de l’esprit basée sur l’amitié et les affinités.

Avec l’arrivée d’Internet, la territorialité qui s’imposait aux relations n’est plus un obstacle à la formation de liens avec d’autres individus. Dans ce contexte, les aspects qui caractérisent toute communauté demeurent mais, les affinités entre les personnes priment alors sur la proximité géographique. N’empêche, il ne faut pas oublier que les personnes qui nous ressemblent le plus sont généralement celles qui partagent la même culture, et donc celles qui habitent la même région.

La formation d’une communauté dépend d’une opportunité d’établir des liens et de la capacité de ses membres à s’organiser. Ces mécanismes de régulation du groupe sont essentiels car ils permettent la formation de l'identité sociale du groupe et déterminent sa capacité à se maintenir dans le temps,

Dans le contexte des communautés à travers les médias sociaux, on comprend que le rôle du gestionnaire de communauté peut être crucial pour créer l’opportunité de formation du lien, pour former les règles de conduite du groupe et pour jouer ce rôle de rassembleur qui favorise le sentiment d’appartenance au groupe. En agissant sur tous ces fronts, il contribue significativement à augmenter la capacité d’une communauté à se maintenir dans le temps.

Références

Castells, Manuel. La galaxie Internet (Trad. de l'anglais par Paul Chemla). Paris: Fayard, 2001, 366 p.
Crozier, Michel et Friedberg, Erhard. L'acteur et le système. Paris: Seuil, Points, Politique, 1977, 500 p.
Harvey, Pierre-Léonard. Cyberespace et communautique: appropriation, réseaux, groupes virtuels. Sainte-Foy: Presses de l'Université Laval, 1995, 239 p.
Rheingold, Howard. Les communautés virtuelles (Trad. de l'anglais par Lionel Lumbroso). Paris: Addison-Wesley France, coll. Mutations technologiques, 1995, 311 p.
Rocher, Guy. Introduction à la sociologie générale, Montréal: Hurtbise HMH, 1968, p. 174.

Pour une définition des termes «réseaux sociaux» et «médias sociaux»

Avec la multiplication des outils de communication, un nouveau vocabulaire voit le jour pour tenter de classer ces nouveaux possibles pour l’interaction sociale. Puisque les technologies émergentes proviennent souvent des États-Unis, les mots qui viennent à nous sont souvent définis préalablement en anglais. Et c’est lorsque l’on tente de les traduire en français que les problèmes commencent...

Afin de palier à l’ambiguïté qui règne dans l’emploi du terme «réseaux sociaux», j’ai d’abord fait l’exercice de consulter l’encyclopédie multilingue en ligne Wikipédia afin de comparer la signification des expressions en anglais et en français. Dès le départ, on constate la confusion, alors qu’un avertissement se trouve en entête dans l’article «Social Network»:

«This article is about the theoretical concept as used in the social and behavioral sciences. For social networking sites, see social networking service. For the 2010 movie, see The Social Network. For other uses, see Social network (disambiguation).»[1]

Je vais fournir quelques pistes pour tenter d’atténuer la confusion qui règne autour des termes «réseaux sociaux» et «médias sociaux».

Réseaux sociaux

D’abord, il faut dire que l’étude des «réseaux sociaux» précède la naissance des technologies de communication autour du développement d’Internet. Le terme «réseau social» est un concept majeur en sociologie dans l’étude des relations interpersonnelles au sein d’une communauté. Dès le début du XXe siècle, des chercheurs importants ont ouvert la voie aux analyses plus récentes de la sociologie des réseaux sociaux, en se penchant sur les types de relations sociales, mentionnons parmi ceux-ci Georg Simmel, Jacob Moreno et Elisabeth Bott.

Les réseaux sociaux sont des ensembles de relations sociales de natures pluriels avec une diversité d’acteurs sociaux qui sont entretenues par différents canaux de communication. Pour sa part, le sociologue Pierre Merklé définit un «réseau social» comme «un ensemble d’unités sociales et de relations que ces unités sociales entretiennent les unes avec les autres»[2]. Ainsi, les individus interagissent avec d’autres individus dans des relations de niveaux variables, spécialisées ou générales, ponctuelles ou durables, en personne ou via une interface technologique. En plus d’interagir avec d’autres individus, chacun entretient des relations avec des communautés, des institutions, des groupes spécialisés, des personnes morales et des marques. Les relations sociales de type réticulaire se démarquent notamment par rapport à une configuration hiérarchique des rapports sociaux, dont l’organisation tend de plus en plus à s’organiser par rapport à la capacité des individus à influencer les autres dans la circulation rapide d'une abondance d’information.

Média sociaux

Les médias sociaux sont des moyens d’échange d’information permettant aux individus de diffuser des contenus autoproduits et de faire circuler celui des autres usagers à travers leurs réseaux de relations sociales. Ainsi, les médias sociaux sont, au départ, des «médias», c’est-à-dire des moyens de diffusion et ou d’échange d’information. Ils se distinguent des autres médias du fait qu’ils favorisent les échanges entre utilisateurs et qu’ils s’appuient sur des techniques de communication particulières, rendu possible grâce à la technologie du Web 2.0. Le concept de «médias sociaux» se réfère donc aux moyens de communication, à la technologie utilisée, aux modes d’interaction sociale ainsi qu’à la culture des usagers de ces services. Andreas Kaplan et Michael Haenlein considèrent les «médias sociaux» comme «un groupe d’applications en ligne qui se fondent sur l’idéologie et la technologie du Web 2.0 et permettent la création et l’échange du contenu généré par les utilisateurs»[3].

La confusion autour du terme «réseaux sociaux»

Le problème origine de l’utilisation, tant en anglais qu’en français, de l’expression «réseaux sociaux» pour désigner deux choses bien différentes. D’abord, il y a les «réseaux sociaux» au sens général d’ensembles de relations sociales avec une diversité d’acteurs. Ensuite, on utilise parfois le même terme pour désigner un type de «média social» en vue de le distinguer des autres, un type de média que l’on peut nommer plus judicieusement «service de réseautage social» (Social networking service).

Ainsi, les médias sociaux, en nombre grandissant, trouvent une nomenclature qui permet de les classer selon plusieurs types: le «service de réseautage social» (Ex: Facebook), le microblogue (Ex: Twitter), le bookmarking social (Ex: Delicious), etc. Bref, l’utilisation de l’expression «réseaux sociaux» pour désigner un type de média social plutôt que le terme «service de réseautage social» est à l’origine de cette embrouillement.

La confusion est d’autant plus grande que le terme «réseau» est souvent employé au seul sens de «réseau informatique» alors qu’il s’agit d’un concept qui signifie un «ensemble de relations» dans plusieurs disciplines: anatomie, géographie, transport, électrotechnique, optique, … Ainsi, l’ajout du qualificatif «social» au mot «réseau» en son sens informatique tend à construire une expression intéressée visant à promouvoir la dimension dynamique des nouvelles applications de la technologie du Web 2.0.

En résumé…

C’est ainsi que l’on peut conclure en disant que les «réseaux sociaux» s’articulent autour des relations sociales de la personne, que les «médias sociaux» se développent autour des modes de communication de la personne et que le «Web 2.0» se déploient par de nouvelles applications pratiques du réseau informatique mondial.


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Notes
[1] Wikipédia.org. «Social Network». Consulté en ligne le 15 février 2012.
[2] Merklé, Pierre. Sociologie des réseaux sociaux, La Découverte, coll. Repères, 2004, p. 4.
[3] Kaplan Andreas M., Haenlein Michael. «Users of the world, unite! The challenges and opportunities of social media», Business Horizons, 2010, Vol. 53, Issue 1, page 61.


Sources